Lee Brilleaux - Rock Spirit
(1991) Propos recueillis par Emmanuel Potts
En 1976, le groupe a dominé les hit-parades
britanniques avec l’album "Stupidity". Ce n’était
que le troisième album de Feelgood ; tout n’est-il pas
arrivé trop vite ?
Probablement ! Nous étions comme un
car sans chauffeur qui dévalait une pente à fond les
manettes ! C’en fut de trop pour nous car nous n’avions
pas réalisé ce qu’il nous arrivait : tout s’était
passé si vite et nous étions sur un nuage ! Par la suite,
nous avons connu un creux, mais comme oublier les mois qui ont suivi
"Stupidity" ? Nous étions jeunes et avons su pleinement
en jouir. Si je revivais cela de nouveau, aujourd’hui, je ne
m’amuserais pas autant qu’à cette époque
! Il est certain qu’il aurait mieux valu connaître un
tel engouement un peu plus tard dans notre carrière, mais nous
ne pouvions le contrôler… pas le moindre regret de ma
part !
Lee Brilleaux - Jukebox (années
80) Propos recueillis par Bruno Librati
1976 est marquée
par la sortie de l'album live "Stupidity" avec le retour
de Vic Maile à la console. Comme je l'ai déjà
expliqué Vic est un très très bon ingénieur
du son. Il nous connaissait très bien, comme nous le connaissions.
Malgré que nous ayons eu quelques points de désaccords
avec lui, il n'y avait aucun grief personnel. C'était uniquement
professionnel. Vic a fait du bon boulot et l'album s'est placé
numéro1. Il a été réalisé dans
deux endroits différents, ce qui était aussi une bonne
idée au niveau des ambiances et du répertoire. La pochette
de "Stupidity" a également été conçue
par le service graphique de United Artists. Nous n'intervenions pas
dans leur décision. Nous étions des garçons turbulents.
Nous ne portions pas attention à tout cela. Nous tournions
énormément et le plus important restait la musique.
Personnellement j'adore cette putain de photo ! Elle représente
bien Dr Feelgood, l'énergie. Elle est là pour choquer.
United Artists était une bonne compagnie pour nous.
Quelle a été la réaction
de Big Figure et Sparko de ne pas apparaître sur le recto ?
Je ne crois pas qu'ils nous en veulent vraiment.
Ce sont deux types supers. Ils n'ont pas la grosse tête !
Qui a eu l'idée d'offrir le 45 tours
"Riot In Cell Block N° 9 / Johnny B. Goode" avec les
premiers exemplaires de "Stupidity" ?
C'est encore une fois la maison de disques.
Une bonne stratégie de marketing. C'était leur projet
de faire ça. Nous avions d'excellentes relations avec Andrew
et les services marketing et promo. Nous étions tous très
contents. La plupart des groupes racontent que rien ne va avec leur
maison de disques, qu'ils doivent souvent frapper du poing sur la
table. Nous n'avons jamais eu ce genre de problème.
Penses-tu que c'était une bonne idée
de faire un album live après seulement deux 33 tours en studio
?
Tout le monde nous répétait
que ce n'était pas vraiment un bon concept, mais nous on s'en
foutait ! Nous voulions le faire de toutes façons, et maintenant
ce LP est monté jusqu'à la première place des
charts ce qui prouve que ce n'était pas un si mauvais projet
que ça !
Vous êtes alors de retour en France pour
plusieurs dates et vous tournez dans le film "Going Back Home".
Nous pensions que nous devions réaliser
un film sur un de nos concerts. La compagnie qui l'a tourné
a malheureusement fait faillite et le film est aujourd'hui entre les
mains d'un huissier. Il est probable qu'on nous le revende et nous
espérons en faire une vidéo.
Vous enregistrez également un 48 tours
avec Lew Lexis, "Boogie On The Street / Caravan Man".
Lew est un ami. J’ai grandi avec Iui.
Il habitait la rue à côté de chez moi. Nous étions
de supers amis. Je lui al appris à jouer de l'harmonica. Ce
qui est marrant, c'est qu’il est aujourd'hui meilleur que moi
! Il est en prison maintenant. Il doit être libéré
cette année. Il devrait être en liberté depuis
longtemps mais Il a fait une putain de connerie. Lew s'est acoquiné
avec des personnes de mauvaises influences, des junkies, des criminels
de bas étages et des idiots. Des gens que je n'ai jamais voulu
fréquenter. J'ai aussi pris des drogues mais je ne suis pas
un junkie. J'ai dit à Lew : "Tu vas avoir de gros ennuis
si tu continues à les voir, tu as la chance de continuer une
carrière musicale, tu perds ton temps à te shooter à
l'héroïne et à boire". Mais il ne m'écoutait
pas. Un Jour, j’ai ouvert le journal et j’ai Iu que Lew
avait été arrêté. Les faits étaient
là. Il s'est pointé dans un bureau de poste de Londres,
avec un cran d'arrêt, une bombonne d'essence et un braquet Il
voulait brûler l'endroit. Il a aspergé les employés
et les clients et menacé la femme derrière le guichet.
Il a demandé la recette. Tout le monde était terrifié.
La femme au guichet lui a donné quelque chose comme 3.000 livres,
ce qui n'est pas énorme. Il a ensuite mis les voiles sur son
vélo et s'est fait attraper au premier pub venu, quelques pâtés
de maisons plus loin, en train de payer des tournées générales
avec le fric des petits épargnants. Comme il avait déjà
eu quelques ennuis avec la justice quand il était plus jeune,
le juge l'a condamné à sept ans de prison. Quelques
semaines après, son avocat obtient sa libération conditionnelle.
Il devait rester en ville et pointer quotidiennement au commissariat
mais Lew a oublié la consigne et il en a définitivement
pris gour sept ans. Durant sa détention sa peine a été
réduite de moitié pour bonne conduite. Il doit sortir
bientôt.
Je l’ai toujours dit, toujours
su ! Depuis ce premier concert auquel j’ai assiste au premier
janvier au Marquee, après le Bataclan, l’Olympia, Orange,
La Villette rouge, finalement, voici le disque de Doctor Feelgood
qui est aussi bon que sa légende ! L’album enregistré
en public qui e laisse rien passer, celui qui vous envoie d’un
uppercut sur le tapis et vous fait revenir en rampant pour en redemander
! Doctor Feelgood live ! Le premier disque des Feelgood fut accueilli
avec réserves. Le temps ne les a pas levées. Un son
trop restreint, malgré une flopée de petits morceaux
vicieusement courts. Le second était meilleur, mais même
s’il levait les ambigüités et révélait
en Brilleaux un chanteur de la classe des plus grands (entre Burdon
et John Kay), il n’était pas aussi crucialement revigorant
que les concerts du damné Dicteur.
Ici, vous aurez tout, et cela signifie foutrement plus qu’avec
n’importe qui. Cet album est de la classe star. La basse de
Sparko n’a jamais été mieux enregistrée.
Sur "Talkin’ About You", il vous tapisse le bas-ventre
de feu. La guitare de Wilko Johnson est capturée dans ses soubresauts
les plus tueurs. Un guitariste qui peut retrouver à lui tout
seul et à la fois la virtuosité de Chuck Berry et la
sonorité de Bo Diddley est un génie dans mon journal
intime. Lorsqu’il s’aventure dans des solos explosifs
et perce le gruyère à la nitroglycérine, comme
ici, il s’impose comme le successeur absolu des Groovies, des
Who, et j’en passe. Figure, le big batteur, a enfin trouvé
son style, et son tempo est aussi saturé et concerné
par ce qui se passe qu’on pouvait espérer qu’il
le deviendrait. J’espère que vous ne comptez pas sur
moi pour vous décrire les nouveaux arrangements de "I’m
a Man", de "Walking The Dog" ou de "I’m
a Hog For You Baby".
Je me ferais ce faisant penser à ces critiques stupides qui
dévoilent le nom de l’assassin à leurs lecteurs.
Et ça ne me laisserait pas assez de place pour louer Mister
Lee Brilleaux, le grand vainqueur de l’affaire. Ses cris d’étripé,
sa voix extasiée modulant un perpétuel Rock’n’Roll,
ses solos d’harmonica purs comme l’enfer, me mettent en
transes. Et voilà, chers petits amis ! Et vous aussi, mignonnes
lectrices, sachez que cet album dont vous voyez la pochette reproduite
est capable de rivaliser avec tous les grands albums live qui donnèrent
au Rock cet aspect de bête furieuse et sauvage, de fauve au
poil collé que l’on enfourche pour des chevauchées
asphyxiantes. Le son est fabuleux, intense. J’ai testé
ce disque avec un indicateur de puissance instantanée : sur
"Goin’ back Home", on voit des crêtes de 55
watts d’un seul coup ! En dirai-je plus ? En dirai-je plus ?
Oh, là, là ! je n’en dirai pas plus.
Philippe
Manœuvre.
© Rock & Folk n°118, novembre 1976
P.S. (évidemment) : C’est un
scandale ! En Angleterre, cet album est vendu avec un simple gratuit,
enregistré lui aussi en public et sur lequel on trouve "Riot
in Cell Block n°9", et "Johnny B. Goode". Pressage
français : le simple a disparu ! C’est une honte ! C’est
immonde ! Nous voulons "Johnny B. Goode" ! Johnny Feelgood
! Chuck Johnson ! Eddie Brilleaux ! Elvis Sparko ! Gene Figure ! Vous
avez été trahis ! Ah, tant pis, le trente est si bon
! Je vais réécouter "Roxette" ! Mais quelle
stupidité !
Presumably this 1976 live album has
been re-released to catch the upsurge in public demand for all things
sweaty and grizzled. A historical document, no less. The Doctor’s
influence was undeniable-according to Blondie, the band’s first
US tour was seen as a turning-point in pop history, as American musicians
were reawakened to the possibilities inherent in black suits and straight
ties. After them the deluge, eh ?
Wilko Johnson alone must have changed
a few lives, persuaded many a youth that trying to play like John
McLaughlin wasn’t the only route to being a guitar hero. And
visually, of course, he provided a role model for a generation of
gangling galoots in Oxfam suits doing their damnedest to perfect that
famous ferret-down-the-trousers glare.
So far, so good. Alas, "Stupidity"
sounds as dreary now as it did (at least, to me) then. The few outstanding
moments are those in which Wilko airs his patented chicken-neck scratch
style - "All Through The City", "Don't Mind",
and especially "Roxette", their debut which they never quite
equalled again - a strut so jerky it sounds like white cretins playing
reggae from sheet music. But there’s also many a helping of
traditional R&B stodge here.
For all the style, the Feelgoods were
a pretty average boys’ night out y - Lee Brilleaux’s eager-to-sleaze
rasp, a couple of dour, dependable 5 good ol' boys in the rhythm section,
and a philosophy of booze, birds and banality. NME critics voted ‘Stupidity’
third best album of '76. Yes, it was that kind of year.
Jonathan
Romney
They finally got
it right
Propos recueillis par Charles Shaar
Murray ©NME 18/09/1976
BOTH of Dr. Feelgood‘s previous albums were somewhat disappointing
to their faithful.
The first one was accused of sounding too thin and tinny and not doing
an adequate job of capturing the manic, flailing energy of their gigs,
while the second - though it went a considerable distance towards
repairing the enery gap - had inferior material to the first. All
relative complaints, of course. The albums were actually pretty good,
but they didn‘t bring the madness and mischief of Basic-Feegoodery
into your home with the same degree of teeth grinding mono-mania that
you remembered from the gigs. “Stupidity” renders both
of {Sue two studio albums obsolete.
It may seem like a bad case of “I
told you so." but everybody who insisted front the first that
the Feelgoods should have been recorded live all along can go pick
up their Nostradamus award. This album is the authentic pounding,
stomping, growling Dr. Feelgood that gets down and gets crazy on stages
all over Britain and blitzes you into getting down and getting crazy
right along with them. Info: side one was recorded at Sheffield City
Hall in May 1975 and comprises "Talkin’ ‘Bout You",
"Twenty Yards Behind", “Stupidity“, "All
Through The City", "I'm A Man", "Walking The Dog",
and "She Does lt Right“.
Side two is from a gig at Southend Kursaal
last November and features "Going Back Home," "I Don't
Mind", "I'm A Hog For You Baby", "Checking Up
On My Baby" and “Roxette." “I'm informed that
the first 20.000 copies will include a free single of "Riot In
Cell Block umber Nine" and "Johnny B. Goode", but the
test pressing I've got doesn't include the freebie. Basically, six
out of the thirteen numbers are new to the Feelgood recorded repertoire,
though a different live version of "I'm A Man" appeared
on one of their B-side while back. All the recordings of numbers from
the previous albums completely trash the studio versions. No trouble,
mate. No trouble at all.
Since the Feelgoods have always disdained
using the facilities of the studio to cosmetise their work, what makes
the difference is not so much the absence of over-dubs and the like
(cuz there weren't any in the first place) but the adrenalin rush
and the lack of the inhibition and self-consciousness that has prevented
them from giving of their best in the studios in the put.
"Stupidity" is nothin‘
but hard-charging Feelgoods rock and roll the way it really sounds,
the way it shoulda sounded all along, an album to play as loud as
you can get away with playing it whenever your feel the need to rod
and stomp like a maniac in the privacy of your own homelet. It carries
you along, sweeps you away on an irresistible adrenalin tide and leaves
you drained and happy going “Whoooooee'eeee!" at the end,
rocks you good like an album should. It’s got their first colour
cover, too. My copy was somewhat bass-heavy. Incidentally, so unless
you're a relative of Sparko's I'd recommend that you give it a lot
of treble. The only worry is where do the Feelgoods go after this.
"Stupidity" provides a perfect
encapsulation of what and where they‘ve been up to now; indeed,
it captures t m so perfectly that unless they carry on to do something
radically new and different they hardly need to make another record.
Still, that's their problem, not yours. For the nonce, “Stupidity"
gives eve who‘s ever gotten off on the Feelgood : a take-home
carry- out souvenir of exactly what it was that got him/her off. Enjoy,
already.